vendredi 8 juin 2012

Pris la main dans le sac, le Centricois fait son mea culpa

AVERTISSEMENT – Le texte qui suit a été écrit dans un souci de développement durable des idées et se veut un point de vue partageable, réutilisable ou rejetable (mais pas jetable!). Tout ce que son auteur souhaite, c'est qu'il puisse modestement contribué, telle une simple goutte dans cette mer qu'est la diversité de la pensée, à mettre du sable dans l'engrenage bien huilé du You are either with us or against us qui sépare les clients des supermarchés en deux catégories : l'Axe du mal des utilisateurs de sacs dits jetables et les vertueux qui sont détenteurs d'une collection plus ou moins grande de sacs dits réutilisables.


Depuis que les supermarchés ont réussi à nous convaincre d'acheter leurs sacs réutilisables pour faire un effort dans la préservation de l'environnement, c'est fou comme cette simple action – à bien des égards saugrenue si on la recadre dans son ensemble – a pris une grande place dans la détermination de qui est un citoyen responsable et qui est un pollueur sans vergogne. Maintenant que l'œil inquisiteur de la bonne conscience écologique est braqué sur ce symbole, peut-être est-ce une fausse impression, mais il me semble que les autres sources de pollution et de détérioration de l'environnement ont la vie plus facile. Polluez autant que vous voulez de la manière dont vous voulez, mais convertissez-vous impérativement aux sacs réutilisables au moment d'emballer vos victuailles à l'épicerie, sans quoi vous subirez le courroux des brigades zélées qui mettent tout leur cœur dans le combat contre CE symbole : le sac jetable mal aimé. Car là, il n'y a aucune nuance dans le jugement : hors du sac réutilisable, point de salut! C'est pourquoi je me retrouve irrémédiablement du côté des vilains.
Je possède une automobile sous-compacte qui consomme peu d'essence, qui est munie de petits pneus d'un diamètre de 14 pouces qui demandent donc moins de matière première – du pétrole – à la production. Mon véhicule est muni d'un dispositif d'air climatisé, qui augmente la consommation d'essence notamment, mais je ne l'utilise que lorsqu'il fait très chaud ou sur l'autoroute, histoire de faire un petit effort, sans aucun inconfort, pour réduire ma consommation énergétique. Ah oui! Je travaille à l'extérieur du Centre-du-Québec, donc j'accumule plus de kilomètres au compteur que la moyenne des ours; par contre, je fais du covoiturage avec une collègue – qui possède quant à elle une sous-sous-compacte – de sorte que mon empreinte environnementale s'en trouve quelque peu réduite.
Mais moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.
Je vis dans une toute petite maison unifamiliale dans un quartier modeste; il est agréable d'y vivre mais, comme je l'ai dit, elle est petite. En couple avec un jeune enfant, bientôt deux, nous ne dédaignerions certes pas pouvoir compter sur un peu plus d'espace habitable un de ces jours. Toutefois, même si j'en avais les moyens, jamais je n'opterais pour l'une des nombreuses monster houses qui poussent un peu partout dans la ville et qui nécessitent notamment des quantités phénoménales de matériaux et de ressources pour lever de terre, sans compter qu'elles occupent de plus grands espaces sur de plus grands terrains qui ont entrainé davantage de déboisement, nécessité le développement accru des infrastructures de service public et encouragé l'étalement urbain. Et j’en passe. Par ailleurs, je ne possède pas de résidence secondaire ni de Winnebago qui engloutissent tout autant de ressources pour des activités justifiables certes, mais secondaires. Bref, le Centricois que je suis n'occupe pas plus de place dans son environnement que ce dont il a réellement besoin ni ne consomme un excès de ressources pour construire et maintenir son habitat familial.
Mais moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.
Comme activité physique, j'aime beaucoup faire du vélo; la Route verte, j'adore. L'activité physique, c'est incontestablement sain pour le corps et l'esprit, mais pour l'environnement? Pas tout à fait si je compte le nombre de véhicules dans le stationnement d'un centre de conditionnement physique devant lequel je passe fréquemment à vélo. Si on calculait tous les litres d'essence qui ont été brûlés et projetés dans l'atmosphère pour permettre à chaque sportif de converger vers l'endroit afin de pouvoir courir sur un tapis roulant, mon petit doigt me dit qu'on n'arriverait pas à un résultat certifié zéro impact pour l'environnement. En ce qui me concerne, par manque d'intérêt et sans doute aussi parce que je n'en ai pas vraiment les moyens, je me contente de faire du vélo en laissant mon auto dans ma cour.
Mais moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.
Dans mes loisirs, je ne joue pas au golf sur des hectares de terrain dont la verdure impeccable est gazée aux pesticides. Je n'ai pas d'intérêt pour la course automobile, la motoneige ou la motomarine, qui carburent à l'énergie fossile et dont le bruit assourdissant correspond lui aussi à la définition de ce qu'est la pollution. Comme je n'ai pas de piscine, je consomme à n'en pas douter moins d'eau de l'aqueduc municipal que la plupart de mes voisins. Par contre, j'arrose mon potager et mes fleurs – pas mon gazon – et je confesse que la fin de semaine dernière, après les travaux de jardinage qui avaient laissé leur lot de boue sur le trottoir de l'entrée, j'ai sombré dans le côté obscur en ayant recours au boyau pour nettoyer le tout. Si vous voyez là un abominable sacrilège, n'ayez crainte car une fois n'est pas coutume : vous êtes tout au plus justifié de me retirer votre appui s'il m'arrivait un jour de songer à me lancer dans une campagne pour devenir porte-parole de Greenpeace! Mais bon, vous le savez déjà comme moi que je ne suis pas digne d'aborder avec crédibilité le thème du respect de l'environnement; la raison suprême qui me disqualifie d'entrée de jeu, vous la connaissez!
Moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.
Je n'utilise à la maison ni herbicides ni pesticides de quelque nature que ce soit pour mon gazon ou mes plantes décoratives. Certains me détesteront en lisant ça, mais qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Un pissenlit, je trouve ça beau. Éminemment plus beau en tout cas que ces petits écriteaux qui sont apposés sur les gazons une fois le doux produit ségrégationniste végétal extrême répandu et qui indique sans subtilité à quiconque qui s'aventurerait à marcher sur lesdits gazons toxiques qu'ils le font à leurs risques pour la santé. Par ailleurs, d'aucuns me trouveront profiteur, car bien que je ne fasse aucune utilisation de tels produits pour avoir un gazon aussi uniforme que le tapis du Stade olympique, j'ai assez peu de pissenlits sur mon terrain, ce qui semble indiquer que je profite gratuitement des bénéfices des herbicides répandus dans les alentours. Mais, trêve d'ironie! Bref, vous me trouverez peut-être simpliste et sans envergure, mais j'ai tendance à vouloir laisser la nature être… naturelle.
Mais moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.
Également à la maison, je fais l'effort – ce n'est pas un gros effort – pour mettre mes déchets compostables dans le bac brun. À cet égard, à voir le peu de bacs bruns au bord des rues le jour de la collecte, il semble bien que bon nombre de citoyens ne se donnent pas encore cette peine. (Mais, entre vous et moi, mieux vaut que seuls les citoyens sensibilisés participent à cette collecte plutôt que de voir les gens composter à contrecœur en mettant n'importe quoi dans leur bac, ce qui contaminerait ainsi – si ce n’est pas déjà le cas - l'effort de l'ensemble.) Aussi, je prends soin de placer les matières recyclables dans le bac vert, en gardant toutefois toujours à l'esprit et dans mes comportements qu'il est encore davantage bénéfique pour l'environnement de moins consommer à la source et de réutiliser que de recycler.
Mais moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.

Suremballage de contrition 

Quand je vois un papier par terre sur la voie publique, il m'arrive assez souvent de me pencher pour le ramasser et le mettre dans la poubelle la plus proche. Mais, je n'ai aucun mérite, car je me penche aussi pour ramasser toute pièce de monnaie laissée à l'abandon.
Quand j'ai soif, je bois généralement l'eau du robinet, que je laisse parfois couler un peu avant de remplir mon verre – mea culpa! –, au lieu de boire de l'eau embouteillée qui a nécessité du plastique pour l'emballage et produit des gaz à effet de serre pour son transport.
Quand je trouve une coccinelle dans la maison, voire une araignée – ô horreur! –,  je lui laisse dans la mesure du possible la vie sauve en l'attrapant et je la ramène dehors dans l'espoir qu'elle puisse y refaire sa vie. Quel insensible bourreau serais-je de ne pas accorder cette seconde chance à un insecte qui ne m'a au fond rien fait?
Quand je séjourne dans un hôtel, je me soumets à la suggestion logique de l'hôtelier de conserver ma serviette après la douche pour la réutiliser le lendemain. Après tout, si je considérais que ma propre serviette était sale après avoir été la seule personne à l'utiliser au sortir de la douche, j'aurais une sérieuse autocritique à faire pour prendre conscience que l'éventuelle malpropreté ambiante n'est pas le fait de l'hôtel mais le mien.
Quand j'écoute de la musique, ce n'est jamais à tue-tête. D'une part, parce que personnellement, je n'aime pas ça et que, par conséquent, l'art musical, j'aime mieux le ressentir que le subir; d'autre part, parce que ça ne me donne objectivement rien d'emmerder mes voisins ou les automobilistes qui me côtoient sur la route avec mes choix musicaux que d'aucuns trouveraient assurément fort douteux. Par ailleurs, ça m'attriste de voir que des gens aient besoin de la puissance de leur système de son pour montrer aux autres qu'ils existent; ça a un côté pathétique de voir des individus marquer leur territoire à coups de décibels simplement parce que le code de vie de leur société ne leur permet pas de le faire en levant la patte dans tous les coins.
Quand je circule en auto, je ne rince jamais mon moteur et je n'accélère jamais en trombe. D'ailleurs, j'ai toujours été fasciné par ces types qui ne peuvent s'empêcher de clancher à fond dès que le feu passe au vert… pour se rendre le plus vite possible et devoir freiner à la prochaine intersection dont le feu est encore au rouge. C'est difficile à mesurer, mais de ce geste complètement inutile, j'ai l'impression qu'il émane beaucoup plus de pollution que des quelques sacs jetables que j'utilise quand je sors d'un magasin… et qui me sont utiles, eux. Aussi, je digresse encore, mais admettez que ce comportement en révèle un brin sur les facultés mentales d'un conducteur qui circule sur une artère de sa ville qu'il emprunte fréquemment et dont les feux de circulation sont synchronisés! Malheureusement pour moi, l'agressif au volant a un avantage que je n'ai pas : il peut laver sa conscience coupable de polluer inutilement par son usage frénétique de la pédale d'accélération en prenant soin de stocker quelques sacs dits réutilisables dans son coffre arrière. 
Alors que moi, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience.

Tant qu'à y être! 

Vous aurez remarqué que j'ai écrit « sacs dits réutilisables ». C'est que mes sacs à moi, on a beau les affubler de la vilaine épithète de jetables, il demeure qu'ils sont eux aussi tout à fait réutilisables. Et c'est ce que je fais, je les réutilise dans toutes sortes d'usages où ils sont par ailleurs à l'occasion fort durables. Et à la fin de leur vie utile, ils sont recyclables ou en effet jetables, occupant incidemment peu de volume au dépotoir dans ce dernier cas.
Là, j'entends des voix outrées qui s'élèvent pour me dire que les sacs jetables se retrouvent un peu partout dans l'environnement, dans les rues, dans les rivières, dans l'estomac de telle grenouille, autour du bec de tel oiseau, etc. Hey! Les amis… Ce ne sont pas les sacs le problème, ce sont les utilisateurs. Si on veut empêcher les sacs de se retrouver partout, ce n'est pas aux sacs qu'il faut s'attaquer, c'est aux comportements des irresponsables qui s'en débarrassent aux quatre vents. Personnellement, je peux vous assurer la main sur le cœur que, tant qu'ils sont en ma possession, il est impossible que mes sacs jetables à moi initie leur odyssée dans l'environnement pour finir par être digérés par une grenouille.
Sinon, tant qu'à y être, pourquoi pas ne pas faire subir à d'autres objets nuisibles le même opprobre public que ces vils et malicieux sacs jetables?
La prochaine personne que vous croiserez mâchant de la gomme, toisez-la de votre regard le plus assassin pour lui faire comprendre que ce qu'elle mâche est le mal incarné et qu'elle se fait donc solidaire de la chique molle qui s'est retrouvée sous votre semelle un jour où vous marchiez sur le trottoir en regardant les oiseaux. Encore mieux : initiez votre lobby pour faire pression sur le gouvernement afin que soit adoptée la même législation qu'à Singapour interdisant la gomme à mâcher sous peine de lourdes amendes. (http://app.www.sg/faq.aspx?cat=20)
Même chose pour la cigarette, ce ne sont pas les fumeurs qui sont responsables de jeter leurs mégots un peu partout. Ô que non bien sûr! C'est la cigarette elle-même qui insiste pour finir sa vie en jonchant le sol. Et que dire de la culpabilité crasse de la salive des cracheurs invétérés qui garnit nos trottoirs ou de celle des Kleenex qui remplissent sans scrupules et en toute impunité nos corbeilles dès que la saison du rhume et des nez morveux arrive.

Des marchands qui se déculpabilisent sur le dos de leurs clients

J'ironise, mais je trouve insultant que les chaines de supermarché dont les rayons débordent de produits suremballés viennent me faire de facto la morale quand j'arrive à la caisse en me vendant les sacs qui me serviront à transporter les marchandises que je viens d'y acheter.
Par exemple, l'autre jour, dans un étalage, il y avait des concombres anglais dont le prix affiché était pour 3. Eh bien, lesdits concombres étaient préemballés… en paquet de 3, en plus de leur emballage individuel bien sûr. Emballage complètement inutile mis à part pour venir en aide à la clientèle ayant de la difficulté arithmétique avec les multiples de 3.
Par contre, à l'opposé, une fois à la caisse, c'est l’approche « arrangez-vous ou payez, bande de méprisables clients gaspilleurs » qui est appliquée! Ainsi, vos trois concombres emballés individuellement ET réemballés par trois, vos produits frais en barquettes de polystyrène, votre tube de dentifrice emballé dans une boite en carton, vos emballages individuels de toutes sortes, etc., produiront bien davantage de déchets – de matières recyclables devrais-je dire – que le maigre sac jetable dont vous auriez besoin pour les transporter. Mais c'est CE sac que le supermarché vous facturera 5¢ en signe de ticket modérateur pour contrer VOS habitudes de pollueur et c'est VOUS que la dame qui vous suit dans la file à la caisse regardera avec un air de dégoût ou désapprouvera ouvertement en blâmant votre génération d'irresponsables pour la destruction de la Terre. Attention! C'est cette même dame qui pourrait, avec sa grosse berline énergivore, vous éclabousser en roulant trop près du trottoir alors que vous retournerez à pied à la maison, l'air penaud, votre sac de la honte à la main. (Note : ce n’est pas par misogynie que j’ai utilisé l’exemple d’une dame, c’est plutôt qu’à chaque fois que j’ai été témoin dans un commerce de quelqu’un qui manifestait sa désapprobation en tiquant ou en commentant ouvertement, ce quelqu’un était une dame. Simple statistique non scientifique qui ne me fait croire en rien qu’un sexe en particulier soit le détenteur exclusif du radicalisme écolo à cinq cennes.)
Cela dit, je ne suis pas contre la vertu et j'ai moi-même quelques sacs réutilisables dans mon coffre. Ce contre quoi j'en ai, c'est l'extrémisme, voire le totalitarisme, manifesté dans la guerre aux sacs jetables sous des prétextes de bonne conscience, alors qu'en réalité, tout cela n'est qu'un montage pour ravir tant les commerçants qui diminuent ainsi leurs coûts d'exploitation que les fabricants de ces jolis sacs dits plus verts qui font des affaires d'or. Comme en toute chose, rien n'est jamais ni complètement noir ni complètement blanc; lorsqu'il est soumis à l'épreuve des faits, le vert aussi peut pâlir! (Voir http://legrandmensongevert.ca/2011/02/10/le-cas-des-sacs-reutilisables-nuisance-ou-solution/)

Une conscience écolo bien rentabilisée

Concrètement, ce que je veux dire, c'est qu'avec le temps, la raison d'être écolo de ces mesures pour réduire la consommation de sacs jetables a fini par se transformer en raison d'être économique. Maintenant que le commerçant est parvenu à obtenir la légitimité pour vous exiger le paiement de 5¢ pour un sac jetable, je vous parie qu'il préfère de loin que vous achetiez des sacs plutôt que vous apportiez vos sacs réutilisables. D'ailleurs, dans mon quartier, la culpabilité semble avoir fait son temps et le recours aux sacs jetables a regagné du tonus. A supermarché du coin, la majorité des clients que j'ai croisés à la caisse lors de ma dernière visite ressortait avec ces sacs (1, 2, 6 ou 8 selon la taille de la commande), au grand bonheur du commerçant j'ose l'imaginer.
Vous trouvez que j'exagère? Afin d'illustrer modestement mon propos, je vous partage une tranche de vie qui est un exemple concret du caractère artificiel de l'argument écolo, de mon impression que ce dernier n'est qu'un prétexte pour justifier la nouvelle valeur économique – le prix – de cet outil légitime pour transporter vos achats.
Il y a quelque temps, je me suis rendu dans un supermarché dont je tairai le nom, mais où le Président nous propose fièrement ses choix, pour acheter un ou deux articles qu'il me manquait pour une recette. Comme c'est une habitude incorrigible chez moi, une fois à l'intérieur, j'ai fait quelques ajouts impulsifs que j'ai ajoutés dans le petit panier à main dont j'avais pris soin de me munir à l'entrée. Évidemment, comme ces achats supplémentaires étaient imprévus, j'avais laissé mes sacs réutilisables dans la voiture.  « Pas bien grave! », me suis-je dit en songeant que j'avais simplement à apporter mes articles dans le panier jusqu'à ma voiture et à les y transférer dans un sac.
Alors que je remettais les articles dans le panier en plastique après les avoir payés, la caissière m'a dit d'un ton sec quoique pas outrageusement impoli : «Monsieur, le panier, y reste ici! », ce à quoi j'ai répondu poliment : « Non, j'en ai encore besoin ». Et je me suis dirigé vers la porte en kidnappant le panier en question…
S'en est suivi ce court et direct échange approximatif qui m'aura valu un air bête notoire – mais pas unique venant d'une caissière de cette bannière – et au terme duquel j'ai commis un acte digne de la plus perfide désobéissance civile :
                « Monsieur… MONSIEUR… Vous devez laisser le panier ici.
                - Madame, j'en ai besoin pour apporter mes affaires.
                - On a des sacs; c'est pour ça qu'on en vend!
                - Mais je n'en veux pas de sacs, j'en ai déjà.
- Monsieur, ces paniers-là, y vont pas dehors!
- Y vont pas dehors? Eh bien, regardez-le celui-là : il va y aller! »
Et il y est allé…
Un dernier regard à la caissière fulminante et hop, je concrétisais l'évasion dudit panier que j'avais sournoisement fomentée en voulant par un geste anodin éviter de me servir de sacs jetables dont je n'avais pas besoin. Rassurez-vous, le journal L'Express n'a pas eu à publier d'avis de recherche pour le panier en fuite, qui est selon toute vraisemblance rentré au bercail sans heurts.
Ce que cet épisode somme toute insignifiant m'a enseigné, c'est à quel point les grandes bannières d'alimentation, au-delà de l'image écologiquement responsable que cela leur procure, n'en ont rien à cirer de vos petits gestes à vous pour éviter la consommation inutile. Vous me direz peut-être que je ne vous apprends rien et que c'est le nerf de la guerre du commerce dans notre société de consommation que vous vous procuriez des choses dont vous n'avez pas besoin… à condition que ce soit vous qui les payiez et pas le commerçant qui vous les offre bien sûr. Si c’est le cas, c’est déprimant, voire répréhensible!

Transporter ses achats en fuyant le mépris

Personnellement, j'applique depuis déjà quelque temps une règle personnelle à mes comportements de consommateur. Si, en tant que commerçant, vous me méprisez au point de ne pas m'offrir un sac pour transporter adéquatement la marchandise que j'ai achetée chez vous, j'irai ailleurs. Et comme les grandes bannières de supermarché telles IGA, Metro et Loblaws n'ont pas le monopole dans le secteur de l'alimentation, les contourner s'avère relativement aisé. (À cette liste de vendeux de sacs à cinq cennes, j’ajoute Zellers et Pharmaprix qui me viennent en tête, mais n’hésitez pas à ajouter les noms que j’oublie afin de rendre la liste la plus exhaustive possible.) En fait, je ne les boycotte pas, je m'en sers plutôt maintenant uniquement comme dépanneur; ça me fait moins de points M ou d'Air Miles à la fin du mois, mais le sacrifice en vaut la chandelle pour éviter d'avoir à jongler avec mes légumes dans le stationnement si par malheur je décide de me laisser gagner par la tentation du moment  et d'en acheter plusieurs. Et moi, je peux me vanter que dans les dépanneurs où je vais, il y a de la variété à revendre!
Pour le reste, j'assume pleinement mon choix d'être vu – à tort – comme un irresponsable malappris, comme un suppôt du gaspillage. J'utilise raisonnablement les sacs jetables, je le sais, et je continuerai à le faire. Mais, si vous me faites des gros yeux, j'accepterai de bonne guerre de m'incriminer de ma mauvaise conscience en me confessant :
« Oui, j'utilise des sacs jetables; je suis donc un sale pollueur sans conscience. »


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